03 Avr Contrôle budgétaire : un accord après des négociations serrées
“Ca coince”
Nous sommes le jeudi 30 mars, vers 7h30. Réunis en comité restreint depuis mercredi soir, le fameux kern, les partenaires de la coalition Vivaldi virent poindre le petit matin alors les négociations restaient au point mort. “Ça coince”, alors que les membres de la coalition s’acharnaient à travailler au finish. La raison ? L’apparente impossibilité de procéder à un nouvel effort de réduction du déficit.
0,3 %, le chiffre-clef
Avancé par la Banque nationale, des économies de l’ordre de 0,3% du PIB sont avancées pour éviter une situation européenne difficile en 2024, de l’ordre de 1,7 à 1,8 milliard d’euros. Mais un problème émerge durant les tractations : à gauche, les économies demandées sont difficiles à avaler pour deux raisons. Tout d’abord, la méthode. Le Premier Ministre propose un assainissement se basant principalement sur la suppression de la quatrième et dernière augmentation des pensions minimales, ainsi que de tout un pan de prestations sociales. Et puis,ce qui coince, c’est aussi l’objectif : les verts et la gauche ne voient aucune nécessité de réaliser des économies supplémentaires, ce qui constitue selon eux une violation des accords initialement conclus.
Un accord en cinq points
Mais à 14h15, surprise ! De Croo se présente devant le Parlement : un accord a été trouvé. Celui-ci permet de garder les Verts et la Gauche à bord, et tient en cinq points. En premier lieu, l’augmentation des pensions minimales n’est plus supprimée mais réduite, comme l’explique l’Echo :
“La quatrième augmentation des pensions minimales interviendra le 1er janvier 2024, mais elle sera ajustée rétroactivement en fonction de l’inflation. La proposition d’Alexander De Croo plaçait la pension minimum à 1.606 euros, l’accord prévoit une augmentation jusqu’à 1.622 euros. Cela devrait se traduire par une réduction des dépenses de 126 millions d’euros.”
Le second point concerne la réduction des prestations sociales, qui se présente comme initialement prévue, à peu de choses près. La garantie de revenus aux personnes âgées GRAPA sera rabotée à hauteur de 65 millions d’euros, le revenu d’intégration à hauteur de 24 millions, et 55 millions d’économies seront réalisées via une réduction des dépenses des minima d’invalidité. En tout et pour tout, ce seront 374 millions d’euros qui seront élagués du budget consacré aux pensions et allocations.
Les mesures prises sur le marché du travail, troisième point de cet accord, permettront de dégager 90 millions d’euros. Si les libéraux voulaient allonger la période de référence pour le chômage et retarder le gel de la dégressivité des allocations, ces mesures ont été remplacées par trois types de mesures. D’abord, l’impossibilité de refuser des métiers en pénurie après une formation, puis la lutte contre les faux licenciements, ensuite l’extinction des indemnités de maladie et enfin le retour au travail.
Les soins de santé, quant à eux, libéreront 100 millions par le biais de la sous-utilisation, “une intervention budgétaire classique”, selon Dieter Dujardin et Jasper d’Hoore, journalistes pour l’Echo.
Les deux derniers points concernent les fiscalités des multinationales et des organisations à but non lucratif. Pour les premières, la Belgique a décidé d’utiliser la variante la plus stricte de l’impôt minimum européen pour les multinationales, dans le but de rapporter 300 millions d’euros de plus que ce qui était prévu dans le budget pluriannuel. On devine là, entre les lignes, l’échange entre les partis de droite, les Verts et la gauche afin de pouvoir agir également sur les dépenses de sécurité sociale et de pensions. Autre économie : le report de l’augmentation de la déduction pour investissement afin de rapporter une centaine de millions d’euros. Enfin, les réductions de cotisations pour les entrepreneurs effectuant leur première embauche, seront limitées aux trois premières embauches. Il s’agit là d’économiser quelque 40 millions d’euros.
En ce qui concerne les économies réalisées sur les organisations à but non lucratif, l’effort se concentre sur l’impôt foncier en particulier. Celui-ci sera plus progressif, comme pour l’impôt sur le revenu des personnes physiques. Ceci permettra de gagner quelque 80 millions d’euros.
Enfin, notons une augmentation des accises sur le tabac.
Comme un parfum de réforme des pensions
Cette liste de réformes ne constitue pas exactement un ensemble cohérent de réformes structurelles. Il s’agit plutôt d’un patchwork de mesures hétéroclites, qui n’endiguera pas l’augmentation des dépenses structurelles, un chantier aux proportions gigantesques pour lequel nous sommes toujours au point mort.