08 Juin Et revoilà le bonus pension…
La ministre des Pensions est revenue hier avec sa proposition de réforme. Enfin, ne nous méprenons pas. Par « réforme », on entend les mesurettes habituelles, qui ne pérennisent absolument pas notre système de pension légale. De quoi s’agit-il ? Pour mieux comprendre sa proposition de “bonus pension”, il nous faut remonter au pseudo accord du 19 juillet dernier. Dans celui-ci, il avait notamment été décidé :
- d’octroyer un bonus pension de 2 à 3 € pour chaque jour effectivement presté après la date de retraite anticipée ;
- de rajouter une condition supplémentaire de 20 années de travail effectif pour obtenir un calcul sur base du montant minimum de pension.
Depuis le 19 juillet dernier, rien n’a été concrétisé ! Aucun consensus n’est sorti du gouvernement, complètement paralysé par la perspective des élections de juin 2024. L’antagonisme gauche-droite bloquant tout, y compris la réforme fiscale tout aussi attendue que la réforme des pensions.
Revenons à la proposition principale de Madame Lalieux, Ministre des Pensions.
Tout d’abord, abordons la question du coût : 2 € de bonus pension par jour, cela représente un coût trop important pour le budget. Le gain pour le retraité aurait été de 52 € de pension mensuelle brute pour 1 année avec bonus (108 € pour 2 années et 156 € pour 3 années).
Le gain n’est pas négligeable. Cependant, le passé (car le bonus a déjà existé) nous a démontré qu’il avait un effet marginal sur l’emploi, et que par conséquent la mesure était inefficace et coûteuse. D’où sa suppression. En fait, le bonus ne pourrait être efficace que dans l’hypothèse d’un malus pour le contrebalancer.
Mais tout cela importe peu, un accord est un accord : remettons le bonus sur la table !
Comme la mesure est trop onéreuse, Madame Lalieux a proposé, dans un premier temps, de n’octroyer le bonus qu’aux bas et moyens salaires. Pour les autres, pas de bonus. Le but étant d’éviter l’effet d’aubaine : plus votre salaire est élevé, plus on a tendance à prolonger sa carrière et donc bénéficier dudit bonus.
Cependant, cette proposition n’a pas rencontré de succès et nous en venons à la nouvelle trouvaille du jour : le capital.
Il est question de donner un capital unique lorsqu’on prend sa pension après avoir travaillé au-delà du seuil de la pension légale anticipée, au lieu d’ajouter 52, 108 ou 156 € bruts de supplément de pension mensuelle.
Le montant du capital net serait le suivant : 7.548 € pour 1 an, 15096€ pour 2 ans et enfin 22645 € pour 3 ans.
Plusieurs problèmes se posent :
Le montant du capital proposé a certainement été diminué, étant donné qu’il fallait faire une économie par rapport à la solution initiale d’une rente mensuelle. Il est donc fort probable que le capital soit épuisé aux alentours des 80 ans. Les femmes, qui ont une espérance de vie plus longue, vont être plus touchées.
Notons également qu’on ne bénéficiera pas des indexations de la rente. En termes concrets, lorsqu’on se trouve en période de forte inflation, le pouvoir d’achat diminue considérablement. Dans ce contexte l’argent que vous aurez reçu quelques mois ou quelques années plus tôt perdra de sa valeur.
Il y a un seul avantage, si votre espérance de vie est plus courte et que vous décédez plus tôt, vous pourrez pleinement profiter de votre capital, ou le laisser à vos héritiers.
Conclusion
Outre le fait qu’il est assez cocasse de voir la Ministre des Pensions socialiste proposer un capital au lieu d’une rente, on peut s’interroger sur l’effet incitatif de recevoir en une fois un montant plutôt qu’une rente. Allons-nous travailler 3 années de plus pour recevoir 22.500 €. Est-ce plus incitatif que 156 € bruts par mois. Peut-être ? Mais ce n’est pas certain. Par contre, ce qui est une évidence, c’est que cela ne constitue aucunement une réforme des pensions.
En effet, c’est le système des pensions tout entier que devrait être revu, en adoptant une vision globale permettant de réformer les fins de carrières, de tenir compte de la pénibilité et in fine de rendre le travailleur plus responsable (avec un système de bonus-malus lié à une carrière pivot et l’espérance de vie).
Sans cette vision globale, mieux vaut ne pas implémenter ce bonus !