Les tensions commerciales déclenchées par l’administration Trump n’ont pas seulement secoué les marchés financiers mondiaux : elles ont également exposé les faiblesses des stratégies d’investissement à long terme des fonds de pension privés européens. En Belgique, où les travailleurs et pensionnés sont de plus en plus nombreux à compter sur les pensions complémentaires, ces bouleversements invitent à la prudence et à une meilleure information.

Une onde de choc mondiale

Lorsque Donald Trump a imposé des droits de douane punitifs sur des produits étrangers, la riposte mondiale n’a pas tardé. Ce bras de fer commercial a provoqué une forte volatilité des marchés financiers, affectant négativement la valeur des actions américaines, un actif pourtant privilégié dans les portefeuilles diversifiés des fonds de pension européens, dont ceux belges.

Résultat : les portefeuilles ont essuyé des pertes, non seulement à cause de la chute des marchés boursiers, mais aussi à cause du repli du dollar américain. En temps normal, cette devise est perçue comme une valeur refuge. Mais dans ce cas, elle s’est affaiblie, rendant les actifs libellés en dollars encore moins rentables pour les investisseurs européens.

L’effet boule de neige sur les pensions complémentaires

Les fonds de pension doivent respecter des ratios de financement précis pour garantir leurs engagements futurs. En Belgique, même si la réglementation est moins stricte que chez nos voisins néerlandais, où les exigences sont très élevées, une chute importante des marchés peut mettre en difficulté les régimes à cotisations définies. Ce type de régime est majoritaire chez nous, notamment via les assurances-groupe dans le secteur privé.

Les pertes boursières pèsent sur ces régimes parce qu’elles sont directement liées à la performance des marchés : si les marchés boursiers chutent, la valeur du capital accumulé baisse, ce qui réduit le montant de la pension à la retraite.

En Belgique, lors de la crise du Covid-19, de nombreux affiliés ont constaté une baisse de la valeur de leur pension complémentaire à cause de la chute des marchés financiers.

Ceci étant dit, en Belgique, la loi impose à l’employeur/l’organisation sectorielle de garantir un rendement minimum légal (2,5 % à partir de 2025). Si les marchés chutent fortement et que le rendement est négatif ou inférieur à ce minimum, l’employeur doit compenser la différence. Mais si le rendement est simplement faible (mais positif), la pension sera plus basse que si les marchés avaient bien performé

Réaction des gestionnaires : garder le cap, mais ajuster les voiles

Heureusement, la majorité des fonds de pension n’a pas cédé à la panique. Au lieu de vendre à perte, la plupart des gestionnaires maintiennent leur cap stratégique à long terme, une attitude souvent plus sage dans les périodes d’incertitude.

Mais cela ne signifie pas l’inaction. Un point critique a été la gestion du risque de change. Beaucoup de fonds ont dû revoir en urgence leurs stratégies de couverture (hedging), car une exposition trop grande au dollar sans protection adéquate a creusé les pertes.

Et pour l’avenir ?

Les analyses macroéconomiques indiquent que si les tensions commerciales devaient s’intensifier, les conséquences seraient lourdes : baisse des exportations européennes vers les États-Unis, diminution des salaires réels, et instabilité financière accrue. Des institutions comme la Banque centrale européenne (BCE) pourraient être forcées d’intervenir plus activement pour stabiliser les marchés.

Pour les travailleurs belges qui ont investi dans une pension complémentaire, ou pour ceux qui y songent, plusieurs leçons peuvent être tirées :

  • Diversifiez vos placements : ne mettez pas tous vos œufs dans le panier américain.

  • Informez-vous sur la stratégie de votre fonds : en particulier sur la gestion du risque de change.

Soyez patient : les crises boursières font partie du cycle économique, et les stratégies paniquées entraînent rarement de bons résultats.