En 2024, la Flandre a vu disparaître La Flandre est le théâtre d'un peu plus de la moitié (55 %) des pertes d’emplois engendrées par les défaillances des petites et moyennes entreprises belges, totalisant ainsi 15.995 emplois perdus. Entre janvier et décembre 2024, ce sont plus de 6.323 entreprises qui ont disparu. Ce chiffre n’est pas seulement une statistique : derrière chaque liquidation se cachent des dizaines, parfois des centaines d’emplois perdus. Les secteurs les plus touchés – commerce de détail, construction, transport, services – sont ceux qui emploient traditionnellement une part importante de main-d’œuvre expérimentée.
Les travailleurs de plus de 55 ans sont parmi les plus exposés lors de ces restructurations. En cas de fermeture ou de licenciement collectif, ils sont souvent les premiers à être écartés des plans de relance ou à ne pas être retenus lors des recrutements dans les entreprises repreneuses. Moins mobiles, parfois en décalage avec les dernières exigences numériques ou logistiques, ils subissent une forme de "double peine" : perte d’emploi et probabilité accrue de rester durablement en dehors du marché du travail.
La situation du site Audi à Forest, bien que situé en Région bruxelloise, résonne profondément en Flandre, où l’industrie automobile est historiquement ancrée. La fermeture de Ford Genk, en 2012, présente des similitudes remarquables avec la situation d'Audi Forest. Ford dégageait un chiffre d'affaires de 3 milliards d'euros et contribuait pour 15% à la valeur ajoutée du secteur automobile belge, avec 4.300 ouvriers et employés dans l'usine même. Au total, la région de Genk perdit plus de 10.000 emplois, ce qui constituait une "tragédie" pour "toute la Flandre" selon le chef du gouvernement flamand de l'époque. Les difficultés du constructeur rappellent à quel point l’économie flamande reste toujours exposée aux soubresauts des grands donneurs d’ordre. Pour les seniors travaillant dans l’industrie ou les services techniques, l’inquiétude est palpable. Le scénario de Ford Genk va-t-il se répéter en Flandre ?
Le besoin de redévelopper une industrie compétitive, verte et localisée, est aujourd’hui largement reconnu. Mais les politiques de formation ou de reconversion industrielle peinent encore à inclure pleinement les 55+. Faute de soutien adapté, beaucoup risquent de ne pas trouver leur place dans les nouvelles filières industrielles – batteries, mobilité électrique, hydrogène – qui émergent en Flandre.
La Flandre continue de faire face à une pénurie de main-d’œuvre dans de nombreux secteurs : soins de santé, technique, éducation, logistique. Pourtant, elle n’arrive pas à attirer suffisamment de travailleurs venus de Wallonie, alors même qu’une main-d’œuvre expérimentée, parfois senior, est disponible de l’autre côté de la frontière linguistique.
Plusieurs facteurs expliquent cette mobilité réduite : barrières linguistiques, freins administratifs, inadéquation entre offres et profils, ou manque de dispositifs d’accompagnement spécifiques pour les travailleurs âgés en reconversion. Résultat : des postes restent vacants en Flandre, tandis que des 55+ qualifiés peinent à retrouver un emploi à quelques dizaines de kilomètres de chez eux.
Dans ce contexte, les perspectives sont suspendues à un éventuel déblocage politique. La reprise économique ne pourra se faire sans une vision claire pour l’emploi des seniors. Cela suppose de dépasser les clivages actuels et de réinvestir dans des politiques actives ciblées : soutien à la reconversion pour les plus de 50 ans, incitations à l’embauche pour les entreprises, valorisation des compétences acquises par l’expérience.
La crise actuelle peut devenir un tournant. Si elle est saisie comme une opportunité pour refonder le contrat économique intergénérationnel en Flandre, les 55+ y trouveront leur place. Si elle débouche sur de simples ajustements de court terme, une génération entière risque de sortir définitivement du marché du travail sans y avoir été réintégrée. Et cela, alors même que l’IA commence à grignoter du terrain sur les emplois au profil junior.